MENTON - 32e
Festival international de Musique NICE-MATIN - Dimanche 30 Août 1981 |
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DIMITRIS SGOUROS: UN PIANISTE ET UN MUSICIEN ETONNANT Soirée exceptionnelle, étonnante, vendredi sur le parvis St--Michel, avec le récital donné par le jeune pianiste prodige grec Dimitris Sgouros (douze ans dans quelques jours). Jouer comme il joue, tant en ce qui concerne la technique que l'expressivité et la musicalité, après seulement cinq ans d'études, relève du miracle, ou de cet héritage génétique dont on parlait déjà à propos de Mozart... et pourtant c'est vrai, et le nombreux public a bien senti qu'il assistait à un événement exceptionnel: la naissance d'une étoile, et de première grandeur. Dimitris Sgouros : un petit garçon apparemment comme les autres, qui a deux passions (le football et la natation), à la fois timide et spontané, assez mal à l'aise quand il arrive sur scène ou répond aux ovations des spectateurs, dévoile dès qu'il s'assied devant le clavier une personnalité exceptionnelle, une maîtrise de soi et de l'instrument, une concentration qui sont le signe des grands, des très grands artistes. On lira par ailleurs le compte rendu de ce concert pas comme les autres, où Dimitris Sgouros a mis en évidence sa virtuosité, son sens esthétique et sa joie de jouer. On en aura eu la preuve, lorsque répondant aux applaudissements d'une salle chavirée de bonheur, il donna, sans se faire prier, et avec le sourire, trois bis époustouflants (qu'il eut la courtoisie de faire annoncer à haute et intelligible voix) : le « Scherzo » de Prokofiev, une étude de Chopin, « Feux follets » de Liszt. Plus tard, très bientôt, lorsqu'il aura son nom à l'affiche des plus grandes salles de concert, le public mentonnais de ce 28 août 1981, pourra dire, parodiant les grognards de Napoléon à Austerlitz : « J'étais à son premier grand concert ». Concert de clôture ce soir, concert de gala dans tous les sens du terme avec, à l'affiche, l'English Chamber Orchestra et Maurice André, difficile de faire mieux. L'E.C.O. a été créé en 1948, c'est une combinaison unique de musiciens confirmés (beaucoup d'entre eux sont très connus comme solistes) et de jeunes artistes dans la musique du XVIII siècle, mais ses activités se, développèrent rapidement, et avec un répertoire embrassant toutes les périodes de la musique de chambre, il a acquis une très haute réputation internationale. Il a joué sous la direction des plus grands chefs et accompagne les meilleurs solistes (on aurait plus vite fait de dénombrer les chefs qui ne l'ont pas conduit et les solistes qui n'ont pas joué avec lui). Parmi les chefs qui l'ont marqué, il faut tout de même citer Benjamin Britten, Daniel Barenboïm, Raymond Leppard. Il jouera ce soir sous la direction de Sir Alexander Gibson, directeur musical de l'Orchestre national écossais et directeur artistique de l'Opéra d'Ecosse ; il est également principal chef invité de l'Orchestre symphonique de Houston depuis cette année. Le soliste sera donc le trompette Maurice André. On n'insistera pas sur la prestigieuse carrière de cet artiste, sur ses concerts, ses tournées à travers le monde, sur ses multiples enregistrements. On retiendra également son exceptionnelle gentillesse, son intime conviction que la musique est bien un des moyens de rapprocher les hommes. Un très grand concert en perspective : on y entendra l'ouverture de « L'Echelle de soie » de Rossini, des symphonies de Mozart et Haydn, et des concertos pour trompette et orchestre de Bellini et Albinoni. |
DIMITRIS SGOUROS: AN ASTONISHING PIANIST AND MUSICIAN English
translation by Systran Friday evening at St-Michel Square was exceptional and astonishing, with the recital given by the wondrous young Greek pianist Dimitris Sgouros (twelve years old in a few days). To play as well as he plays, with regard to technique as well as expressivity and musicality, after only five years of studies, is miraculous, the same genetic heritage of which one spoke in connection with Mozart... yet it's true, and many of the public felt they had attended an exceptional event: the birth of a great star.
And this concert was unusual compared to others, in that Dimitris Sgouros emphasized his virtuosity, his aesthetic sense and his joy of playing. The proof of this came, when in response to the applause of the captivated audience, he gave, without being asked, and with a smile, three encores (which he had the courtesy to announce with a high and understandable voice): the "Scherzo" of Prokofiev, a Chopin etude, "Feux follets" of Liszt. Soon, when his name appears on the posters of the largest concert halls, those members of the public present on this 28th August 1981, will be able to say, parodying the grognards of Napoleon at Austerlitz: "We were at his first great concert." [...] NICE-MATIN - Sunday August 30, 1981 |
NICE-MATIN - Dimanche 30 Août 1981
Dimitris Sgouros à Menton
Une étoile est née
Le rédacteur de cette chronique que cinq laborieuses années d'étude du piano nonchalamment menées ont difficilement conduit jusqu'au troisiè-me recueil des «Classiques favoris», fait des complexes, c'est le moins que l'on puisse dire, après le récital du prodige grec de douze ans, Dimitris Sgouros (vendredi soir à Menton) qui, au bout du même laps de temps, atteint au niveau qui est le sien, et qui le place d'ores et déjà parmi les grands, les plus grands.
Au fait, il n'y a pas de complexe à nourrir car on se trouve ici en présence d'un cas exceptionnel, d'un génie défiant la logique et l'analysé, d'un personnage habité par le dieu de la musique. On ne peut qu'admirer, s'extasier, se laisser entraîner dans ce monde à part, fait de joie et d'émerveillement. Essayons cependant d'aller un peu plus loin, de comprendre le prodige.
D'abord concernant la personnalité. Dimitris Sgouros, à la fois timide et spontané, un peu gauche quand il salue, acquiert dès qu'il se met au piano une présence extraordinaire: concentration, maîtrise de soi, et maîtrisé du clavier, tenue, style. Aucun exhibitionnisme mais un jeu inspiré, une tension, une attention, une vigueur qui suscitent l'admiration.
Du point de vue technique, il n'y a pas grand-chose à dire, c'est presque parfait. Cette étonnante virtuosité permet à Dimitris Sgouros d'aborder sans complexe et «sans casse» des pages aussi difficiles que la Méphisto-Walz de Liszt et surtout les Paganini-Variations de Brahms, que les plus grands pianistes de la fin du XIXe, à commencer par Clara Schumann, traitèrent de «diaboliques» et refusèrent de jouer. Tout y passe avec précision et rigueur: enchaînements et combinaisons de tierces, de sixtes, d'octaves; grands sauts, légatos, staccatos, traits fulgurants, délicats problèmes rythmiques, le tout somptueusement résolu. Une grande leçon de virtuosité.
Si l'on s'en tenait la, ce serait déjà exceptionnel mais on pourrait croire avoir affaire à un petit animal de cirque, une sorte de phénomène, de bête curieuse. Mais Dimitris Sgouros est aussi un musicien déjà accompli qui crée une musique pensée, réfléchie, très personnelle, très émouvante. Il peut ainsi donner une version exceptionnelle de la Fantaisie de Chopin, tour
à tour tendre et tumultueuse et surtout de l'Apassionata de Beethoven, notamment de son andante, un moment de rêve.Que cela soit bien entendu: Dimitris Sgouros n'est pas un monstre, un mutant, c'est un enfant, un prodige certes, mais un enfant. On ne saurait donc lui reprocher de manquer parfois de puissance ou certaines baisses de tension. Mais quel avenir, quelle potentialité! Il lui reste à poursuivre dans cette voie royale, en gardant sa gentillesse et sa spontanéité... et en n'écoutant pas trop les louanges du public et de la critique.
René DOUMENE
Concert au Palais Princier
Avec Rainier III de Monaco
MENTON | ||
58ème Festival de Musique | ||
Date :
Samedi 18 Août 2007 Concert hommage à Mstislav Rostropovitch Orchestre du 58ème Festival Direction, Jean-Bernard Pommier
Tchaïkovsky - Variations rococo pour violoncelle et orchestre
op.33
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Dimitris Sgouros, Mischa Maïsky, Jean-Bernard Pommier
Menton - Un final dédié à Rostropovitch
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